Chaque année, l’arrivée de l’hiver marque le début d’une période cruciale pour de nombreux locataires en France : la trêve hivernale.
Cette période, souvent méconnue, est pourtant essentielle pour protéger les foyers les plus vulnérables des expulsions.
Les origines et la portée de la trêve hivernale
La trêve hivernale trouve ses racines dans une volonté de protéger les locataires des rigueurs de l’hiver. Entrée en vigueur en 1956, cette mesure vise à éviter que des familles ne se retrouvent à la rue pendant les mois les plus froids de l’année.
Initialement, elle a été inspirée par des mesures sociales post-Seconde Guerre mondiale, formalisée pour répondre à un besoin croissant de protection des ménages précaires.
Elle s’étend généralement du 1er novembre au 31 mars, interdisant toute expulsion de logement durant cette période, et s’applique, qu’importe le motif de la procédure.
C’est le cas qu’il s’agisse d’impayés de loyers ou de troubles de voisinage, sauf rares exceptions comme les expulsions liées à un péril imminent ou à une décision pénale.
Cette période de répit est essentielle pour les familles en difficulté, car elle leur permet de se stabiliser et de chercher des solutions pour régulariser leur situation.
Pour les propriétaires, la trêve hivernale peut représenter un défi, surtout en cas d’impayés de loyer prolongés. Cependant, le but premier reste d’assurer un minimum de dignité et de protection pour tous lorsque les températures plongent. Bien que cette trêve soit protectrice, elle ne suspend pas les procédures d’expulsion.

Les démarches peuvent se poursuivre devant les tribunaux, mais aucune expulsion physique ne peut être réalisée avant la fin de la trêve.
En effet, seul un accord à l’amiable entre le propriétaire et le locataire peut aboutir à une sortie volontaire du locataire durant cette période.
Dès le 1er avril, les expulsions peuvent reprendre, mais elles doivent respecter un cadre légal strict. Avant cela, il faut signifierpar un huissier de justiceun commandement de quitter les lieux, après obtention d’un jugement définitif.
Le délai accordé au locataire pour quitter le logement peut aller de quelques semaines à plusieurs mois selon la décision du juge. Les propriétaires doivent s’assurer qu’ils ont obtenu un jugement définitif et respecter les délais légaux pour éviter toute expulsion abusive.
Les droits des locataires pendant la trêve
Durant la trêve hivernale, les locataires bénéficient d’une protection renforcée.
Toutefois, ces droits ne signifient pas un laissez-passer pour négliger leurs obligations, notamment en matière de paiement de loyer. Il est crucial de comprendre ce que cette période implique réellement.
Tout d’abord, il est important de souligner que pendant la trêve hivernale, les locataires ne peuvent pas être expulsés physiquement de leur logement, même en cas d’impayés.
Cependant, cela ne suspend pas leur obligation de payer le loyer. Les montants dus continuent de s’accumuler, et il est recommandé de maintenir un dialogue ouvert avec le propriétaire pour tenter de trouver un arrangement.
Dans certains cas, la CAF peut intervenir en maintenant ou en rétablissant l’aide au logement sous conditions, pour éviter à la dette locative d’empirer.
En parallèle, des aides peuvent être sollicitées, comme le Fonds de Solidarité pour le Logement (FSL), qui peut épauler les locataires en difficulté pour couvrir une partie de leurs dettes.
Par ailleurs, les locataires ont le droit d’être informés des décisions judiciaires concernant leur situation locative.
Ils peuvent faire appel à des associations de défense des locataires pour mieux comprendre leurs droits et avoir accès à une assistance juridique si nécessaire.
Il est essentiel de noter que, même si la trêve hivernale protège contre les expulsions, elle n’affecte pas la coupure des fournitures d’énergie comme l’électricité ou le gaz.
Certaines sociétés de fourniture d’énergie choisissent néanmoins de suspendre leurs coupures durant cette période, mais cela reste à leur discrétion et non une obligation légale.
Les obligations des propriétaires et bailleurs
La trêve hivernale n’est pas qu’une période d’attente pour les propriétaires de biens immobiliers.
Bien qu’ils soient dans l’impossibilité d’expulser leurs locataires, ils ont des obligations à respecter pour gérer efficacement cette période de l’année.
Un propriétaire dont le locataire ne paie pas le loyer durant la trêve hivernale doit prendre des mesures pour faire valoir ses droits sans recourir à l’expulsion immédiate.
Cela inclut le dépôt d’un dossier complet devant le tribunal pour obtenir un jugement en sa faveur, qui pourra être exécuté dès la fin de la trêve.
Les démarches peuvent inclure la rédaction d’une assignation à comparaître, la constitution d’un dossier de preuve et l’engagement d’un avocat, ce qui prend du temps et ont des coûts.
Il est également conseillé de maintenir un dialogue constant avec le locataire pour explorer toutes les possibilités de règlement amiable.
Les propriétaires ont aussi le devoir d’assurer la salubrité et la sécurité du logement pendant la trêve hivernale.I ls doivent prendre en charge les réparations nécessaires et garantir que le logement reste conforme aux normes légales en vigueur.
Il est important de se rappeler que les propriétaires, comme les locataires, ont accès à des recours juridiques et des aides financières en cas de litiges.
Ils peuvent solliciter des conseils auprès de professionnels du droit immobilier pour naviguer dans ce système complexe tout en protégeant leurs intérêts.
Dans ce cas, les honoraires d’un avocat spécialisé varient selon la complexité du dossier, mais se situent en général entre 150 et 300 euros de l’heure.
Un huissier de justice facture entre 90 et 150 euros la signification d’un acte ou d’un commandement de quitter les lieux. Certains bailleurs optent également pour des assurances loyers impayés, dont le coût moyen est de 2,5 à 4 % du loyer annuel.
Les procédures légales pendant la trêve

Durant la trêve hivernale, les procédures légales continuent de suivre leur cours, mais avec certaines spécificités.
Ainsi, s’il n’est pas possible d’expulser physiquement un locataire, les démarches judiciaires peuvent être initiées ou poursuivies pour préparer le terrain post-trêve.
Un propriétaire souhaitant entamer une procédure d’expulsion doit d’abord s’assurer que toutes les étapes administratives ont été respectées.
Cela inclut l’envoi d’une mise en demeure au locataire pour l’informer des impayés et l’inviter à régulariser sa situation. Par la suite, en l’absence de régularisation, le propriétaire peut saisir le tribunal compétent pour obtenir un jugement d’expulsion.
Il est à noter que les décisions de justice prises pendant la trêve ne sont pas exécutoires avant la fin de celle-ci. Cependant, cela laisse le temps aux différentes parties de se préparer et de négocier des accords amiables si possible.
Pour les locataires, cette période est également cruciale pour chercher des solutions de relogement ou des aides financières pour régler les impayés.
Il est recommandé de consulter un avocat spécialisé en droit immobilier pour naviguer efficacement dans ce processus. Les procédures peuvent être complexes, et un professionnel du droit peut offrir une aide précieuse pour protéger vos droits et vos intérêts.
La trêve hivernale est une période essentielle de l’année qui protège les locataires vulnérables d’expulsions immédiates. Cependant, cette protection s’accompagne de responsabilités pour les locataires comme pour les propriétaires.
Naviguer dans cette période nécessite un équilibre entre la compréhension des droits et obligations de chacun et la recherche de solutions amiables lorsque c’est possible.
